Impossible pour moi de rater cette exposition qui est encensée partout dans les médias. Celle de la galerie du Jeu de Paume il y a 11 ans m’avait fait découvrir des facettes d’un César que j’ignorais. J’ai aimé particulièrement cet artiste après cette première exposition. J’ai été particulièrement déçue après celle-ci. Pourtant, il y avait les mêmes œuvres.
C’est dans des cas comme ça qu’on comprend l’importance et l’enjeu du métier de commissaire d’exposition.
C’était une belle idée de proposer à un architecte – Jean Nouvel – de faire la scénographie de cette exposition, d’autant plus que Nouvel et César étaient amis. Mais voilà. En pratique, cette scénographie reste dans le domaine de la belle idée. Rien ne se passe entre le lieu et les œuvres, ni entre les œuvres elles-mêmes qui se juxtaposent par thématique, transformant chaque sculpture en une simple variante des autres. Seule idée qui fonctionne presque, mais uniquement en vue plongeante depuis la mezzanine, certaines expansions prolongent les colonnes métalliques de la salle, mais malheureusement pas toutes.
En un mot, rien à voir avec l’alchimie qu’avait su créer Daniel Abadie au Jeu de Paume un an avant la mort de l’artiste. Cette fois, les œuvres ne prennent pas leur sens, voire se désœuvrent comme les Balles de journaux empilées dans le jardin: Nouvel a voulu reconstituer la sculpture Un mois de lecture des Bâlois. Il a donc reconstitué les balles non plus pour les bâlois mais pour les parisiens (1ère perte sémantique) et pas avec des journaux et revues mais des papiers recyclés de toutes sortes, packaging industriel en tête (2ème perte sémantique).
Certainement cette exposition aurait gagné en pertinence et en finesse si elle s’était mise sous le haut patronat théorique de feu Pierre Restany, le grand critique d’art qui a poussé César à aller jusqu’au bout de ses compressions au moment où son principal collectionneur menaçait de le lâcher s’il continuait dans cette voie. Mais ce nom n’apparaît sur aucun document de communication. Oubli ou volonté d’évincement? Quoi qu’il en soit, cela témoigne du rôle ingrat que les institutions culturelles réservent à la critique d’art.